dimanche, novembre 24, 2024
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Meriem, 28 ans, diplômée et chômeuse sans espoir

Une lectrice, Meriem, 28 ans, a envoyé un texte, à la rédaction. Un cri de détresse à lire. “Au nom de la liberté, n’ignorez pas mon message, je veux témoigner,

informer, péter un câble peut-être, mais cela reste mieux que de m’immoler par le feu…je veux que ma voix retentisse, je veux parler pour ces jeunes, qui se donnent la mort rongés par le désespoir de pouvoir voir un jour ce pays se relever, ce pays au grand corps malade, aux membres défectueux, qui ne cesse de sombrer, nous tombons un à un de Charybde en Scylla, entre les barques de la mort, l’illusion de l’eldorado à l’autre rive de la méditerranée et le chômage, la pauvreté, la misère, l’amertume dans un pays où nous sommes devenus étrangers.

Par où devrai-je commencer? Existe-t-il des gens heureux dans ce pays? J’aimerai bien les connaitre, j’ai 28 ans, une femme algérienne, célibataire, au chômage, vous voulez en savoir plus? j’étais la première de ma classe; la première de tout le lycée; j’ai eu mon bac à 16 ans; terminé mes études universitaires à 20 presque 21 ans, j’ai pu dénicher un petit boulot d’enseignante vacataire à l’Université, j’enseignais 3 heure par semaine, et à la fin de l’année, j’ai touché mon salaire…5000 DA… j’ai ensuite intégré des sociétés étrangères où j’ai bossé comme une esclave, 12h par jour six jours sur sept, et c’est là que j’ai découvert qu’il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond, l’Algérie, notre cher pays fait appel à des étrangers qui touchent 20 fois mon salaire pour qu’ils nous volent, mon boss était cameraman de formation il ne valait rien dans son pays, ils l’ont ramené pour superviser des travaux de piping (gaz et pétrole) un autre boss était magasinier de formation, il avait l’habitude de compter les casiers de pommes de terre et de carottes, ils venaient tous avec des diplômes (fake) , des diplômes d’ingénieurs et de superviseurs…tout le monde était complice, ces pseudos patrons (…) avaient tous les avantages, ceux de vous humilier, de vous imposer leurs idées, leurs méthodes de travail, leurs incompétences…et de la pression, beaucoup de pression au vu est su de nos pseudos autorités, ils vivaient dans des bases de vie semblables à des hôtels 5 étoiles,

avaient tous les avantages du monde, et surtout pouvaient décider de votre sort: “ce mois-çi je termine ton contrat”…après tout ça venez me parler des désastres causés par l’explosion de telle usine ou telle structure pétrolière…car ceux qui l’ont bâtie ne sont rien d’autre que des ratés dans leur propre pays et que nous importons.

Ils n’envoient jamais des gens compétents en Algérie, car elle est classée zone à grand risque, tout ceux qui y débarquent ne sont rien d’autres que des vautours aventuriers, avides de faire fortune en un temps record.

Honte à cette Algérie. J’ai 6 ans d’expérience, je parle 4 langues…et je me retrouve au chômage, j’essaye de trouver du boulot dans ma petite ville (qui n’est pas la capitale) …vous dites l’Anem (Agence nationale de l’emploi, ndlr)? Personne ne vous reçoit. Je suis allée à l’Université dans l’espoir de trouver un boulot même en tant que vacataire…dans les bureaux de l’administration je n’ai trouvé que des vieux…hideux, dont les racines pourries sont enfoncées bien au fond, des vieux dépassant la soixantaine qui boivent du café, lisent des journaux, et vous répondent avec dédain: « allez voir ailleurs ». J’allais me contenter de 5000 dinars par an, car même les 9000 da de la DAS (l’Action sociale de wilaya ) je n’ai pas pu en bénéficier…9000DA de charité, du ministère de la solidarité…je n’ai pas pu en bénéficier aussi !

A QUI APPARTIENT CE PAYS? Ma mère ne le comprend pas…elle ne cesse de me répéter que je suis une ratée, que je fais pitié…que j’ai raté ma vie, et pourtant j’ai tout fait pour réussir, votre Algérie m’a fait perdre l’espoir de vivre dans la dignité, je ne veux pas l’aumône, je veux mes droits. Je ne veux pas que mon seul espoir soit un homme… j’aurai aimé être née dans une époque où les femmes n’allaient pas à l’école ; j’aurai aimé être ignorante, me marier à 16 ans avoir 10 gosses…j’aurai aimé ne jamais avoir conscience de tout ce qui se passe, des manipulations du pouvoir, de l’hypocrisie …j’aurai aimé être simple d’esprit, illettrée…et être heureuse, j’aurai aimé ne pas être algérienne”.

Badreddine BENYOUCEF, Octobre 2013 Nîmes France

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