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Les Evenements Kabyles et Leurs Repercussions

On est interpellé depuis trois mois par les évènements de Kabylie. Il y a des réactions de tous bords et tenter de se retrouver dans ce patchwork risquerai de nous infliger un fatal tournis. Bien entendu, nombreux sont ceux qui, dans leur analyse, font une distinction, bien perceptible, entre kabyles et algériens. Moi, je les appelle les tisseurs de feu, les tireurs sur l’ambulance, les snipers de l’Algérie…

On est interpellé depuis trois mois par les évènements de Kabylie. Il y a des réactions de tous bords et tenter de se retrouver dans ce patchwork risquerai de nous infliger un fatal tournis.

Bien entendu, nombreux sont ceux qui, dans leur analyse, font une distinction, bien perceptible, entre kabyles et algériens. Moi, je les appelle les tisseurs de feu, les tireurs sur l’ambulance, les snipers de l’Algérie…

On est tous, à des degrés divers, concernés, par ces tristes évènements. Pour ma part, je dirai, pour l’anecdote, que j’ai dû rebrousser le chemin sur la RN5 (Constantine-Alger) un certain 26 avril 2001, alors que je me rendais à Bou Ismaïl, avec toute ma famille, pour un heureux événement… C’est vous dire si je suis concerné…

Mais, force est de constater que les jeunes Kabyles, que je n’appellerais pas ” émeutiers ” n’ont pas raison ou tort, d’avoir fait ce qu’ils ont fait, mais je pense qu’ils ont réagi viscéralement à l’absence de perspectives pour leur avenir. Et ça, il n’y a pas de plus cruel dans la vie d’un individu.

Ceux qui ont lu l’article sur les Hitistes vont de suite faire le lien. Il me vient à l’esprit mon passage au ministère de l’agriculture en novembre 1975. Je venais de décrocher mon diplôme de fin d’études et je venais pour une affectation… On m’a proposé 160 possibilités… De nos jours, la différence est de taille. Je viens de rentrer du Bled et j’ai vécu une scène, j’allais dire presque désopilante si elle ne préfigurait pas, justement ce qui vient de se passer en kabylie. Je me suis engouffré dans l’une de ces voitures civiles qui pullulent dans toutes nos villes et qui font ce qu’on appelle le TAXI CLANDESTIN (il n’ya pas de sot métier)…. Le chauffeur était… un ancien étudiant à moi, excellent élève au demeurant, qui avait achevé ses études en 1993… et qui n’avait trouvé que ce moyen pour survivre. Je ne vous raconte pas la suite, parce que je ne sais pas relater le désespoir d’un jeune.

C’est pour vous dire que notre pays est arrivé à un moment de son histoire où une solution, j’allais dire n’importe laquelle, doit émerger, sous peine de sombrer dans un chaos indescriptible. Même là, les esprits malsains diront que c’est aussi une solution… Et que ce sera tant mieux !…

Non, ce qu’il faut retenir de cette crise endémique qui secoue notre pays, ceux sont les faits. Il y a eu par exemple 130000 jeunes reçus au BAC cette année. On nous précise même que le taux de réussite est un record… 34,41% pour être précis… On va assister dans quelques semaines, à une remise de prix aux lauréats du BAC. Le ministre de l’éducation va sans doute remettre des billets d’avion aux dix premiers afin qu’ils se rendent à PARIS où à New York. C’est bien tout ça… Mais personne ne nous parle des 65,59 % restants. Cela fait exactement 349260 jeunes qui vont, encore cette année, rejoindre les rangs de nos Hitistes. Gageons, pour leur triste avenir, que si rien n’est entrepris pour eux, et rien ne sera entrepris, qu’il y aura des destinées diverses : les plus heureux seront ceux qui seront autorisés à redoubler. Pour les autres, laissés pour compte, ils s’agripperont à la rampe Tafourah et rêveront à tous ces bateaux qui s’éloignent des quais du port d’Alger.

J’ai même des échos, non pas alarmants ou défaitistes, mais qui vous plantent un décor à refroidir en vous, toute tentative de réflexion. Jugez-en par vous mêmes :
– Les Kabyles travaillent, affrontent le danger et ceux sont les autres qui vont récolter les lauriers…
– J’ai peur que cette rage va s’éteindre sans réveiller ni le Peuple algérien ni le pouvoir…
– Franchement, j’ai remarqué que les autorités (gendarmes, policiers…) sont plus cools depuis les évènements…

Et bien d’autres remarques.

Il y a aussi les conséquences de ces évènements. Déjà, les opérateurs du tourisme de la côte kabyle, et ceux sont de vrais kabyles, se plaignent d’une saison qu’ils redoutent morte… La belle Riveria Bougieotte, est semble-t-il déserte.

Mais ce qu’il faut retenir, avant d’aborder les solutions, c’est que, dans l’ensemble, les algériens, sont presque tous d’accord sur un point : IL FAUT QUE CELA CHANGE…

Qui n’est pas d’accord sur ce point ? Citons pour mémoire quelques vérités étalées aux yeux de tous ces jeunes qui sont plus que dépités par ce qui se passe dans leur pays :

1 – Savoir, par exemple, qu’un député, ” élu du peuple ” se pavane avec une mensualité de plus 140000 dinars est à même de transformer n’importe quel jeune, aussi bien éduqué qu’il soit, aussi flegmatique qu’un anglais, en un acteur de l’intafadah actuelle,

2 – Apprendre, par le NET (quel miracle) que des comptes planqués en Suisse, avec numéros, gestionnaires des comptes, adresse de la banque et tutti quanti, sont crédités, qui de 65 millions de dollars, qui de 45 millions de dollars, qui de 25 millions de dollars, (que des dollars US)… ne laisse aucun algérien indifférent.

3 – Apprendre que pour s’installer en Algérie, la société DAEWO a versé 2 millions de dollars à un général me fait pousser un cri : MAIS DE QUEL DROIT ?

Mais, il y a bien plus grave… L’Algérie est composée, comme chacun le sait, de plusieurs catégories d’algériens… Il y a ceux qui, selon l’ordre établi, méritent de l’être. Citons pour mémoire :

A/ Les anciens moudjahidines, les fils d’anciens moudjahidines, leurs petits-fils pour n’oublier personne et n’omettons pas la 4° génération qui doit aiguiser ses lames au lait bien importé…

B/ Les militaires sont, comme chacun le sait, une caste à part. Je partage le point de vue de quelques officiers qui s’expriment librement sur le NET. Il ne faut pas généraliser. Les officiers qui n’ont pas connu la guerre de libération, qui ont transité par Cherchell, Koléa, sont bien loin de nager dans l’opulence. Je connais certains qui se débattent dans des problèmes de logements. Non, ceux qui posent problèmes sont, nous dit-on au nombre de ONZE (11). Il y a bien plus grave… Je dirais qu’il y a plus de ONZE. Si ce n’était qu’une question arithmétique… Mais pour le malheur de l’Algérie, il y en a eu bien plus que ONZE généraux.

Il y a plusieurs catégories de généraux. Il y a des généraux à la retraite (heureusement) il y a des généraux qui ne font pas partie ” des ONZE ” mais tous obéissent à la règle exponentielle de la multiplication de la race humaine… En clair, tous ont des enfants, qui eux, se prennent, REELLEMENT, pour des GENERAUX… Et là, vous n’avez qu’à bien vous tenir, le pays leur appartient… J’ai connu des fils de généraux qui s’immisçaient même dans la désignation de PDG d’entreprises publiques… Après ça, allez demander à ces PDG d’être impartiaux dans leurs décisions de toutes sortes (recrutement de personnel, désignation des fournisseurs, destination de la production…)

C’est pour vous dire que l’ordre établi doit absolument changer. Il est intolérable de savoir que le scanner du port d’Alger a été mis en panne volontairement, certainement pour bloquer une importation et de faire grimper le Bakchich attendu…

Tant que des faits semblables nous sont relatés, on reste dubitatifs quant à une sortie de crise. Mais, il est nécessaire de distinguer quelques détails dans la crise actuelle :

Les Kabyles revendiquent l’instauration de la langue Amazigh dans tout le pays. Pour ma part, j’ai longtemps pensé que cette exigence était démesurée. Avec le temps, j’ai révisé mon point de vue. Si ce n’est que ce point qui constitue le goulot d’étranglement, EH BIEN INSTAURONS LA LANGUE AMAZIGH dans toutes les écoles MAIS, OUI MAIS, laissons le choix aux écoliers algériens. Que celui qui veut étudier l’anglais, le français, le japonais ou le chinois ne soit pas bridé dans son choix. N’est-ce pas que l’une des règles fondamentales de la démocratie, que tous ces jeunes recherchent à leurs corps défendant, est justement LA LIBERTE DU CHOIX. Si je veux voter pour X ou pour Y, je dois pouvoir le faire. Si j’estime que mes enfants doivent étudier dans une langue Z ou R, je dois pouvoir le faire.

C’est à cette condition, et à cette condition seulement et qui doit nécessairement être avalisée par nos frères kabyles, que des solutions valables et pérennes peuvent émerger de la crise actuelle.

Ensuite, il s’agit de remettre à plat, MAIS VRAIMENT A PLAT, de nouvelles bases pour notre société. Si c’est pour faire du neuf avec du vieux ce n’est pas la peine de nous triturer les méninges. Sauf que je doute fort que les conditions ne soient pas réunies pour entreprendre une telle manœuvre.

Il faut d’abord, diluer les passions. Songez à une solution sans reconnaître les erreurs passées ne servira qu’à attiser les braises. Le pouvoir doit s’incliner devant les victimes de la répression comme IL DOIT indemniser ceux qui ont tout perdu lors des manifestations. Je pense spécialement à l’agence KIA MOTORS, dont le PDG est actuellement hospitalisé et qui a perdu, sous une vague menaçante, plus de 300 véhicules. Ca aussi, c’est une injustice. Je ne connais pas le gérant de cette société, mais rien que de savoir, par voie de presse, que c’est un travail de plus de 30 ans qui a été anéanti par une vague de jeunes en furie me laisse quelque part meurtri, aigri et dépité.

Enfin, il s’agit de regrouper, tous les hommes et femmes de bonne volonté (il y en a ) de provoquer une sorte de conférence où toutes les idées seraient décortiquées. Bien sûr, BARRA toute notion de Parti, de couleur politique ou religieuse… De convaincre notre big Boutef, de dissoudre LES DEUX CHAMBRES, de nommer un gouvernement de transition AVEC DES HOMMES NOUVEAUX et de jalonner un avenir qui placerait comme priorité des priorités LE TRAVAIL DES JEUNES… Ouvrir des chantiers dignes de notre pays… On peut à cet égard en proposer un paquet… Il suffit de le vouloir, qu’une volonté politique se manifeste sans réserve pour cela et j’en suis convaincu, TOUS LES JEUNES ALGERIENS approuveraient une telle démarche.

Telles sont consignées mes modestes remarques utopiques pour certains, démesurées pour d’autres, farfelues pour les sans-idées, menaçantes pour les tenants du pouvoir mais réalistes pour ceux qui aiment réellement l’Algérie.

ALORS, OU VOUS CLASSEZ-VOUS ?

Benyoucef Badreddine, le 3 juillet 2001

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