lundi, octobre 7, 2024
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Algérie underground : Jam’in Alger

Ce week-end, j’emprunte l’Escalier des Artistes, place Audin, Alger centre. Descente dans l’envers du tournage d’un clip musical. Descente en enfer, dirait un intégriste… Par Beya Othmani

Il se crêperait la barbe en voyant ça. Un petit bout de Nouvelle Orléans à quatre pas de sa douce mosquée. Le génie s’exprime, en live, quelques heures seulement après la fin de la grande prière du vendredi. Le paradis appartient à ceux qui se lèvent tôt – la grasse matinée s’impose aux autres, qui cuvent leurs péchés. Je suis de ceux-là, pour qui l’illumination vient des saxophones plutôt que des mégaphones.

L’ébullition créative qui sévit dans cette cave est bluffante. Je me pince. Suis-je vraiment à Alger ? Au-dessus des canapés rouges, le propriétaire du café-théâtre a accroché des vinyles qu’il a chinés rue Didouche Mourad. Les photographes et cameramen s’affairent autour de la scène. Un homme attire mon attention. Il aurait pu être à Paris, San Francisco ou Berlin. Il porte l’uniforme de l’anticonformiste : queue-de-cheval, casquette, tee-shirt usé Harley Davidson, bras maigres et un jean trop grand. Les musiciens commencent à jouer, sous l’œil protecteur d’un graffiti de Maceo Parker.

Les mélodies ont quelque chose d’andalou, de berbère, d’africain, de jazz. « Le Jam, m’explique un ami, c’est très simple. Chaque musicien y ramène sa touche et de là, nous créons un morceau. » Je ne suis pas à la Nouvelle Orléans, mais bien à Alger Centre.

Un percussionniste ivoirien donne le rythme avec son instrument. Il s’appelle Dipicama. On ne sait pas ce qu’il fait à Alger, mais on sait que le groupe l’a rencontré dans la rue, en face de la Grande poste. C’est un maître de djembé.

Ce melting-pot entre l’Algérie, l’Afrique, l’Andalousie et l’Occident, c’est bien ça, somme toute, l’identité des Algérois. Cette ville ressemble à un enchaînement de notes saccadées et parfois dissonantes sur les cordes des mandoles ou des guitares électriques, que les musiciens aident à lisser, à adoucir.

« Silence, s’il vous plaît. Que tout le monde se taise ! Nous devons faire un test son ! », s’exclame l’assistante de réalisation.

L’absence soudaine de bruit paraît bizarre dans cette ville que le brouhaha de ses âmes tient toujours éveillée. Mais voilà que la réalité se rappelle à notre bon souvenir par une gentille secousse, un petit tremblement de terre, ce vendredi à Alger. Même Dieu pense que la capitale ne doit cesser de bouillonner !

Bahdja.com 2015 – source:lemonde.fr

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